Quelques précisions sur la toxine botulique avec le Dr Eugenio Broccaioli
Le traitement par toxine botulique est très demandé par les patients. Néanmoins, il est important d’apporter quelques précisions car les patients confondent souvent la toxine botulique avec l’acide hyaluronique. Le Dr Eugenio Broccaioli, chirurgien maxillo-facial à Paris, nous en dit plus sur cette substance qui est employée à des fins très spécifiques.
L’injection de toxine est destinée à traiter les rides dynamiques (secondaires au mouvement d’un ou plusieurs muscles). Pour mieux comprendre l’effet de ce traitement, il faut penser à ce qu'il arrive quand on plie plusieurs fois une feuille de papier, c'est-à-dire que le papier aura une marque plus évidente à l’endroit exact du pli. Un effet similaire arrive à notre peau. Le muscle est la cause des plis de la peau. En relaxant le muscle, on agit sur la cause de ces plis.
Qu’est-ce que la toxine botulique ?
Il s’agit d’une protéine produite par une bactérie qui est purifiée et concentrée afin d’obtenir un médicament. Ce médicament, une fois injecté, bloque la transmission du signal entre un nerf et un muscle, afin d’empêcher la contraction musculaire. L’effet dépend de la force du muscle, de la quantité de toxine injectée, de la sensibilité du patient à une toxine spécifique (il y en a de plusieurs sortes) et de la diffusion de la toxine.
Quelle est l’indication de la toxine ?
L’indication primaire est le traitement des rides causées par la contraction musculaire, typiquement présentes sur les lignes horizontales du front, les lignes entre les sourcils (rides du lion) et les rides latérales des yeux (rides de la patte d’oie).
Il y a des indications pour traiter l’hypersudation, la migraine, le bruxisme, la rhinoplastie médicale, etc. il faut néanmoins évaluer le dossier médical du patient et vérifier s'il est possible d'entreprendre ce type de traitement.
Ce traitement est-il réservé à certains médecins ?
Oui, même si la législation est en train d’évoluer. Actuellement, en France, seuls les chirurgiens plasticiens, les dermatologues, les chirurgiens maxillo-faciaux et les ophtalmologues peuvent utiliser la toxine. Le patient doit s’assurer de la spécialisation de son médecin traitant afin de vérifier s’il peut effectivement proposer ce type de traitement.
Combien de temps est-il nécessaire pour voir les effets du traitement et combien de temps cela perdure-t-il ?
L’efficacité apparaît dès la première semaine. Elle atteint son maximum entre quinze jours et un mois et se maintient pendant 4 à 6 mois environ. Le retour à l’état initial est progressif et se fait à partir du 4ème au 6ème mois, les contractions musculaires reprenant lentement. Une nouvelle séance d’injection de toxine botulique peut alors être proposée. Il est nécessaire de respecter un délai minimum de 4-6 mois entre chaque séance. Il est toutefois possible que le patient ne réponde pas à la toxine ou que la durée d’action soit inférieure.
En effet, la réponse au traitement est variable selon la toxine utilisée (il y a différents laboratoires qui en produisent). Le taux de réponse est environ de 66% à 8 jours, 76,8% à 1 mois, elle diminue ensuite progressivement et seuls 15,1% des patients montrent encore des effets à 6 mois. L’important est d’être régulier dans l’utilisation car le but est d’habituer le muscle à un état de repos, afin qu’il soit moins actif, même au moment où l’action de la toxine aura disparu.
Est-il possible de ne pas avoir de résultat ?
On s’interroge sur la possibilité d’une réponse du corps avec des anticorps qui pourraient neutraliser la toxine.
Certains laboratoires ont ajouté dans leurs formulations d’autres protéines pour stabiliser leurs toxines. La présence de ces protéines stabilisantes pourrait être à la base de ce phénomène de production d’anticorps. Dans ce cas, le patient est résistant et n’aura pas de résultat. Ceci arrive surtout si le patient fait trop souvent ce type de traitement. C’est la raison pour laquelle il est conseillé de pratiquer l’injection de toxine que 2 fois par an.
S’il est constaté que le patient ne répond pas à la toxine, il est indiqué de faire une pause d’un an et de recommencer avec une toxine qui n’a pas ces protéines stabilisantes. Malheureusement, ce type de toxine est beaucoup moins forte en termes de résultat et de durée d’action.
Quelles types de précautions faut-il envisager après le traitement ?
Nous conseillons d'éviter l'exposition prolongée au soleil, aux températures inférieures à 0°C, aux UV, ainsi que la pratique du hammam ou du sauna pendant quelques jours suivant l'injection. Il est grandement déconseillé de frotter ou de masser les zones injectées pendant 48 heures. L'on évitera l’utilisation des casques ou d'autres éléments vestimentaires qui peuvent exercer une pression sur les sites traités, et cela pendant 48 heures.
Quels types de suites sont potentiellement possibles ?
Comme pour toute injection, il est possible d’avoir le site du traitement endolori, des rougeurs, des œdèmes, des démangeaisons, des fourmillements, des ecchymoses. Ces réactions peuvent disparaître entre 48h et 8 jours. Dans 10 % des cas de patients, il est possible d’avoir un œdème des paupières qui se manifeste rapidement et qui peut perdurer 10 jours.
Si le produit est diffusé sur des muscles qui ne doivent pas être traités, il est possible d’avoir des asymétries (selon la région traitée). En ce qui concerne le traitement du front et des rides du lion, même si cela est rare, il est possible qu'une ptose de la paupière (paupière supérieure tombante) apparaisse. Ce genre de suites est rare et généralement dû à la diffusion d’une dose pas trop importante du produit (la durée sera limitée).
Y-a-t-il un antidote pour résoudre les suites rares de cette diffusion malheureuse ?
Non, seulement le temps fera évoluer le cadre clinique et la récupération sera progressive. Il faudra juste patienter.
Est-il possible de combiner ce traitement avec d’autres traitements ?
Oui, il est même conseillé car les divers traitements agissent en synergie. Par exemple il est possible de pratiquer une séance de toxine sur le front et 15 jours après, de poser des fils tenseurs pour relever la queue des sourcils. Il est possible de traiter les rides du lion et 15 jours après pour affiner le résultat avec une séance d'injections d’acide hyaluronique.